Quand la vie reprend autour d’un verre
Vendredi 4 octobre, les rires ont remplacé le silence habituel du hall principal. À La Roselière, on ne servait pas du café tiède, mais bien du vin, de la bière et même un peu de rhum. Le tout, dans une ambiance joyeuse et sans chichi. C’est que l’établissement a récemment acquis une licence IV, permettant de vendre des boissons alcoolisées au-delà de 18 degrés.
Le directeur, Robert Kohler, n’a pas voulu laisser passer l’occasion. Lorsqu’un restaurant du village s’apprêtait à rendre sa licence, il a eu cette idée simple : la transférer à l’Ehpad. Pas pour faire du chiffre, mais pour ramener un peu de chaleur humaine là où la routine avait fini par s’installer.
Un bar pas comme les autres
Ici, pas de néon, ni d’happy hour. Le bar est tenu par des bénévoles, avec douceur et bienveillance. Les résidents peuvent venir s’y asseoir chaque samedi, en compagnie de leurs proches, autour d’un petit verre et d’une grande conversation. Certains y retrouvent un plaisir oublié, d’autres une forme de liberté.
Le directeur le dit sans détour : « Le but est d’apporter de la vie. » Une phrase simple, mais lourde de sens. Car dans ce lieu où les sorties se font rares, c’est désormais la société qui entre. Les habitants du village pourront d’ailleurs bientôt s’y rendre, dès novembre, pour partager un moment avec les aînés. Une idée presque évidente, mais encore trop rare.
Réinventer le lien social au grand âge
Ce projet dépasse le simple cadre d’un bar. Il pose une question plus vaste : comment maintenir un lien vivant entre les générations quand la dépendance isole ? Les Ehpad ne devraient pas être des lieux de passage, mais des lieux de vie. Et parfois, un simple comptoir peut suffire à recréer des ponts.
Quand on y pense, les moments marquants de la vie se partagent souvent autour d’un verre — fêter, discuter, se confier. Pourquoi en priver ceux qui ont bâti le monde avant nous ?
- Un bar crée une atmosphère familière, loin du cadre médicalisé.
- Il permet aux familles de vivre autre chose qu’une visite chronométrée.
- Il stimule la parole, les souvenirs, les sourires.
Une idée qui pourrait inspirer d’autres établissements
On parle souvent d’innovation technologique, rarement d’innovation humaine. Pourtant, c’est dans ces petits gestes que naissent les grandes transformations. D’autres Ehpad pourraient bien suivre l’exemple de Kunheim, en ouvrant leurs portes à la convivialité et à la vie quotidienne.
Bien sûr, certains fronceront les sourcils : « De l’alcool dans une maison de retraite ? » Mais ceux qui y voient une dérive oublient que tout est question de mesure. Ici, personne ne cherche l’ivresse, seulement la saveur d’un moment partagé.
Et si vieillir, c’était simplement continuer à vivre ?
À La Roselière, cette phrase prend tout son sens. Ce bar n’est pas une excentricité, mais un symbole. Celui d’un lieu où la vie ne s’éteint pas, elle se transforme. Et parfois, elle se réinvente autour d’un petit verre de vin blanc.
Finalement, il suffit parfois d’un comptoir, de quelques bénévoles et d’un directeur un peu audacieux pour rappeler que vieillir ne veut pas dire s’effacer. À Kunheim, on trinque à la vie — et ça, c’est une belle nouvelle.
Source : Valeursactuelles.com
